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La révolution de la com n’est pas en marche.

Entre frilosité des annonceurs au bois dormant, confort et contraintes des agences ogres, c’est pas pour tout de suite.

En lisant l’interview de JeremStar dans Stratégies où, je cite, il nous annonce avoir “révolutionné le fonctionnement des agences de com’” (https://goo.gl/N5f6xe), je ne peux pas m’empêcher de rebondir sur le talent de Jeremy Gisclon et la sortie de sa biographie officielle pour donner ma vision, non pas du marketing, mais du marché et de son fonctionnement. Stratégies n’étant pas disponible, je la partage ici, vous ne m’en voudrez pas.
Le “professionnel” de la com que je suis devenu, qui a connu des métiers, des environnements, des collaborateurs et des agences de toute sorte réagit donc à ce papier fantastique dans un magazine tout entier dédié à la communication sur un jeune débrouillard plutôt malin et sans aucun doute ambitieux qui annonçait avoir révolutionné le fonctionnement des agences de com. Les agences apprécieront. Les annonceurs également.

Qu’est-ce qui a changé dans nos grandes et belles agences françaises ?

Alors, oui, la critique est facile. Oui, je n’ai pas les 5 salariés qu’il a embauchés ni vendu à de grandes marques diverses et variées des productions publicitaires sur Snapchat et je ne suis pas un “personnage” influent ni auprès d’Uber ou de Coca. Encore moins sur Snapchat où les filtres me rendent plus beau et plus drôle qu’ici. Certes. Mais quand même.
Il est vrai que cette “jeunesse” a apporté de la fraicheur à l’offres du marché publicitaire on et offline. En bousculant “un peu” l’existant pour vendre du VIP de télé-réalité ou en se spécialisant sur des réseaux comme Instagram ou Snapchat. Mais l’existant représente quoi ? Que ce soit en volume, en pourcentage, ou même en fonctionnement, qu’est-ce qui a changé dans nos grandes et belles agences françaises depuis que ces jeunes entrepreneurs ont décidé de ne pas venir travailler pour elle et se sont lancés dans la création d’entreprise ?

Notre univers s’encroûte

Rien. Ou si peu. Les annonceurs continuent à être rangés entre ceux qui savent faire des briefs qui ne seront confiés qu’à des agences qui ne travaillent pas en-dessous de 250k et ceux qui ne savent pas écrire deux lignes de brief et finiront par ne pas confier la mission de l’appel d’offres et diviser le budget initial par 10. Voir 20. Ou rien. Les process de fonctionnement sont globalement les mêmes. Des directeurs de clientèles, des directeurs aux titres en anglais, spécialistes de tout avec une expérience de 18 mois. Des créatifs intouchables et cloisonnés, incompris et trop souvent freinés dans leurs créativité destructrice mais constructrice. Et de jeunes loups plein d’ambition qui sont dans le digital “pour l’instant” et qui auront fait plus d’agences en cinq ans que vous aurez vu de films au cinéma. Allez soyons honnêtes, une chose à changer. Le nombre d’intitulés de poste sur les devis et factures et dans les comptes Twitter.

Et le problème qui se pose, c’est que notre univers, ce que nous aimons faire dans nos métiers respectifs de la communication s’encroûte, s’enracine. La passion s’est transformé en routine de vieux couple. Il y a bien quelques frémissements bien sûr, causé par des esprits innovants ou revanchards qui veulent bouger les choses et tentent bon gré mal gré de botter la fourmilière. Mais le constat, c’est qu’ils finissent souvent par rentrer dans le rang, au bout de quelques années et quelques centaines d’embauches, pris par l’administratif, les contraintes, le légal, la concurrence et des annonceurs qui ont l’impression que finalement, c’est moins bien la deuxième année. Ils ont quitté les grandes agences pour créer de petits agences devenues (trop) grandes à l’appétit féroce et sans fin/faim.
Les appels d’offres ont transformé les agences, toutes les agences, publicitaires, relationnelles, digitales ou événementielles en groupe d’interventions rapide tentant de trouver un juste milieu entre les coûts engrangés et la nécessité d’avoir un portefeuille suffisamment hétérogène et attractif pour pouvoir répondre à d’autres appels d’offres. Tout le monde fait aujourd’hui son appel d’offres pour un oui et beaucoup de non, pour des périodes de plus en plus courtes et des missions de moins en moins rémunératrices. Les cahiers des charges sont soit épais et motivants comme un code de chez Dalloz, soit massacrés en copier-coller incompréhensibles et aussi digestes qu’un menu XXL chez KFC.

Les réseaux sociaux, c’est quand même pas bien compliqué. Et puis c’est pas cher.

Le pire reste le digital. Ou le numérique. Enfin bref, tout ce qui n’est pas entre les mains des grands acheteurs média et de leurs logiciels magiques. Toujours en mouvement, entrainé par un courant digne d’un épisode de Tomb Raider, les gens qui tentent de faire du online se réorganisent et se désorganisent entre chaque demande interne de groupe, qui ont besoin de vendre et tente de rentrer par la porte numérique, et celles externes de clients, qui pensent que les réseaux sociaux, c’est quand même pas bien compliqué. Et puis c’est pas cher. On fait du quotidien, répétitifs et routiniers et on transforme les reportings dans la forme sans jamais rien retirer du fond. Désespérées, les agence agglutinent les stagiaires et les moins de trente ans à la rémunération raisonnable autour de la gestion de la demande client, souvent incohérente ou totalement déconnectée de la réalité stratégique de l’entreprise (pourquoi aller chercher une audience de moins de 25 ans quand vous voulez faire du BtB ?) pendant que les annonceurs ne savent plus quoi faire des rapports de trente pages qui démontrent combien le taux de clics est exceptionnel et l’engagement au plus haut. Ce qui se passe après, “c’est compliqué” et pas que sur Facebook. Mais c’est pas cher.

Alors parler de “révolution” quand du haut de ses followers, fans, les influenceurs, blogueurs et jeunes entrepreneurs du web réussissent à attraper un pourcentage bien trop bas du marché publicitaire, c’est une exagération qui outre les égos ne flattera certainement pas ceux qui auraient les moyens de révolutionner la com et qui n’en ont aucune volonté. Mais cela occupera ses responsables digitaux (le vrai titre est plus long, mais j’ai déjà pris trop de votre temps) pendant que les directeurs marketing et les dirCom oublient leurs stratégies de marque en s’essoufflant dans des Powerpoint pour tenter de ne pas se faire couper plus de 10% de leur budget . De quoi leur permettre de tourner, pardon, adapter deux pubs internationales, financer une campagne d’affichage sans pré-tests de visibilité, payer un peu de print en simple plage dans le tunnel de pubs que personne ne regarde et sauver le soldat numérique qui permet d’avoir des résultats bien plus rassurants quand ils sont mis en forme. Et qui n’est pas cher. Bien loin des besoins en investissements nécessaires dans la relation client, les programmes de fidélité vide ou les programmes d’acquisition à l’agonie. Ou l’analyse des données marché, clients, produits, distribution. Le tout dans l’urgence, la patience n’étant plus une valeur publicitaire depuis la préhistoire où on a enterré le moyen et le long terme.

Savoir dire non, oser dire oui est une des clés à la réconciliation avec les publics, clients ou non.

La révolution publicitaire qu’on nous promet à chaque nouveau support, télé, ordinateur, tablette, smartphone, est un Viagra dont l’effet cumulé peut-être fatal au marché. Tout le monde s’y ennuie, les innovations sont l’arbre caché par la forêt qui est là depuis cinquante ans avec ses arbres malades, et tout coûte de plus en plus cher, même ce qui est sous-traité à des tarifs que personne ne veut plus entendre. Sauf le digital bien sûr. Ah si, lui aussi (cf. les CPM, taux de clics, taux d’engagement ou autre mémorisation publicitaire qu’il faut alourdir avec les frais de structures, de créations pour des bannières insupportables et des sponsorings invisibles dans des LT surchargés de créations banales).

Réveillez-vous la com ! Réveillons notre envie de surprendre, de donner du plaisir à notre audience, de créer des marques émotionnelles, de réussir à faire passer des messages qui ne se mélangent pas avec ceux de nos concurrents dans une confusion digne d’une ouverture de soldes. Maltraitez la routine de l’achat média, provoquez des malaises chez les planneurs stratégiques qui sont devenus bien terre à terre pour des planneurs. La fourmilière est tellement haute que la colonie ne travaillent plus qu’à la consolider pour qu’elle ne s’écroule pas. Quand je vois l’intelligence sous-exploitée, la fraicheur asséchée, l’innovation sectionnée par les coupes budgétaires, il est grand temps que la révolution arrive. Peu importe les âges, les métiers, les compétences, annonceurs et agences doivent enfin se remettre en cause que ce soit dans leur fonctionnement internes ou dans leurs façons de travailler. Savoir dire non, oser dire oui est une des clés à la réconciliation avec les publics, clients ou non. 
Tout ça commencera par une remise à plat non seulement des fonctionnements, mais également des stratégies et surtout, surtout, par des envies de passage à l’acte et de ne pas vivre le jour de la Marmotte.

Et puis vous aurez peut-être un article dans Stratégies…

 

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David Dargaud
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